Équité versus égalité, comment comprendre les biais cognitifs peut-il est le levier pour passer de la loi à l'action choisie
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Équité versus Égalité, le rôle caché des biais cognitifs

Le saviez-vous vraiment ? Derrière les mots “équité” et “égalité” se cachent deux réalités très différentes. Aussi sûrement que nos biais cognitifs influencent puissamment la façon dont nous percevons, jugeons et agissons sur ces sujets.

Égalité, la notion d’égalité de droits

L’égalité renvoie à l’idée que nous devons tous être traités de la même manière. C’est un principe juridique et social fondamental : mêmes droits, mêmes devoirs, mêmes règles pour chacune et chacun. Sur le papier, c’est clair et rassurant. Mais dans la réalité, traiter tout le monde de façon identique ne garantit pas forcément des résultats justes.

Exemple : donner à chaque élève le même manuel scolaire. L’égalité est respectée. Mais si certains élèves n’ont pas les mêmes conditions d’apprentissage (fatigue, environnement familial, handicap, accès limité à Internet…), alors cette égalité de moyens ne mène pas à une égalité de résultats.

Équité, la réponse adaptée aux situations d’inégalités

L’équité va plus loin. Elle consiste à prendre en compte les différences de situations, d’histoires, de contextes, pour ajuster les moyens. Son objectif : offrir à chacune et à chacun les conditions de départ qui permettent d’atteindre le même niveau d’opportunité.

Exemple : certains élèves auront besoin d’un accompagnement personnalisé, de temps supplémentaire, ou d’outils adaptés pour apprendre dans de bonnes conditions. C’est ça, l’équité : ajuster le soutien en fonction des besoins, pour tendre vers une réelle justice sociale.

Mais alors, pourquoi seule l’équité peut garantir une vraie justice sociale ?

Traiter les différences uniquement sous l’angle de l’égalité est certes plus simple à expliquer et à appliquer, mais cela peut s’avérer destructeur. C’est d’ailleurs pour cette raison que de nombreuses lois ont vu le jour pour tenter de compenser les écarts, comme la loi Copé-Zimmermann (2011) sur la parité dans les conseils d’administration ou la loi Rixain (2021) qui impose des quotas dans les instances dirigeantes. Ces dispositifs légaux viennent corriger un déséquilibre structurel, mais ils restent focalisés sur une logique d’égalité de traitement.

Or, ce que la majorité silencieuse réclame, ce n’est pas seulement l’égalité : c’est l’équité. Une équité qui reconnaît que nous n’avons pas tous les mêmes points de départ, ni les mêmes obstacles. Et pour y parvenir, il est indispensable de comprendre les biais cognitifs qui creusent et entretiennent ces différences. Cette prise de conscience est un passage obligé pour réellement adresser les enjeux d’équité.

Les biais cognitifs, obstacles invisibles à l’équité

Si l’équité semble “logique” une fois expliquée, pourquoi est-elle si difficile à mettre en œuvre ? Parce que nos biais cognitifs se mettent en travers du chemin.

1. Le biais de statu quo

Nous avons tendance à préférer ce qui existe déjà, par confort ou habitude. Résultat : le biais de statu quo fait nous résistons aux politiques qui cherchent à redistribuer autrement, même si elles créent plus de justice.

2. Le biais de l’illusion du monde juste

Nous surestimons le rôle des victimes dans leur propre situation et nous sous-estimons l’impact du contexte. Autrement dit, nous avons tendance à croire que chacun reçoit ce qu’il mérite. Si une personne est discriminée, c’est qu’elle n’a pas fait assez d’efforts ; si elle est en difficulté, c’est qu’elle ne s’est pas battue. Le biais de l’illusion du monde juste nous rassure car il maintient l’idée d’un monde ordonné et prévisible, mais il occulte la réalité des inégalités systémiques.

3. Le biais de normalité

Nous considérons comme « normal » l’environnement dans lequel nous avons grandi ou évolué. Ce biais nous pousse à croire que notre expérience est universelle. Par exemple, quelqu’un issu d’un milieu favorisé peut penser qu’il est « normal » d’avoir accès à de bons soins de santé, à des études supérieures, à un réseau professionnel… sans voir que ce n’est pas le cas de tout le monde. Le biais de normalité invisibilise les inégalités en les faisant passer pour de simples exceptions.

4. Le biais d’auto-complaisance

Nous attribuons nos réussites à nos efforts, à notre talent, à notre mérite personnel et nous avons tendance à attribuer les difficultés des autres à leurs manques. C’est le fameux « s’il n’y arrive pas, c’est qu’il ne s’est pas donné la peine ». Ce biais renforce l’idée que les privilèges structurels n’existent pas, et qu’il suffirait de travailler plus pour réussir. Une vision séduisante… mais terriblement injuste.

5. Le biais d’ancrage

Une première information ou expérience influence durablement notre jugement. Si on grandit dans un contexte où les inégalités semblent “normales”, on a plus de mal à remettre en cause cette perception. Ajoutez à cela que notre environnement a tendance à renforcer ce sentiment de normalité dans ses prises de parole et cela se transforme en biais d’ancrage.

Pourquoi l’équité est cruciale aujourd’hui ?

Dans les entreprises, les écoles, les associations et même nos cercles personnels, la confusion entre équité et égalité empêche souvent d’avancer. On pense “tout le monde a la même chose, donc c’est juste”. Mais ce raisonnement occulte la complexité des situations réelles.

Les biais cognitifs renforcent cette illusion : ils brouillent notre regard et nous poussent à maintenir des systèmes qui paraissent neutres, mais qui reproduisent les inégalités.

Remettre les biais cognitifs à leur place, un levier d’équité

Comprendre la différence entre équité et égalité, c’est déjà un premier pas. Mais pour avancer, il faut aussi apprendre à identifier nos biais cognitifs car ils influencent nos jugements, souvent à notre insu.

Parmi les initiatives efficaces et simples à mettre en place, il en est une qui me touche tout particulièrement : la Fresque de l’Équité. Cette animation ludique permet justement de rendre visibles ces mécanismes invisibles. Elle donne des clés pour réfléchir sans culpabiliser, partager sans juger, et agir de manière plus juste.

Parce qu’au fond, le vrai défi n’est pas de traiter tout le monde pareil. Le vrai défi, c’est de donner à chacune et à chacun les moyens d’exprimer son potentiel. Et ça, ça demande de l’équité… et un peu de lucidité sur nos biais cognitifs.

Si vous deviez ne retenir qu’une seule chose de cette lecture !

L’égalité nous rassure, mais l’équité nous transforme !

Pour aller plus loin :

Et surtout écoutez l’épisode 41 du podcast : 5 minutes pour tout savoir sur la Freque d’Équité sur Spotify, Apple, Amazon et Deezer

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Un commentaire

  1. Merci pour cet article lumineux et profondément nécessaire. Ce que j’ai particulièrement aimé, c’est la façon dont tu distingues avec clarté égalité et équité, deux notions souvent confondues mais qui portent des implications très différentes pour les individus et les structures sociales. On ressent que derrière la rigueur théorique, il y a aussi un souci réel de justice, de respect des parcours et des besoins de chacun.e.
    n lisant cet article, je repars avec l’envie de porter plus d’équité dans les petits gestes : dans les mots qu’on utilise, dans les décisions qu’on prend, dans les attentes que l’on nourrit…. et c’est déjà beaucoup. Bravo pour ce beau travail !